Et après ?
Après le feu, il y a la cendre. Après l’incendie de Notre-Dame, il y a la conscience, amère, des destructions et des pertes ; mais aussi de ce qui reste, de la braise qui luit, de la flamme sous la pierre. L’après 15 avril 2019, c’est aussi le début d’une épopée humaine, de l’individu servant l’universel, d’une entreprise de bâtisseurs au XXIe siècle. L’espoir se mêle à la tristesse, et l’avenir de Notre-Dame se dessine, peu à peu, dans une nouvelle lumière.
Un lourd bilan
Le matin du 16 avril, une vision d’apocalypse attend les équipes chargées de constater les dégâts. En s’écroulant, les 500 tonnes de bois et les 250 tonnes de plomb qui composaient la flèche ont enseveli la croisée du transept, ainsi qu’une partie de la nef, sous les débris calcinés. L’effondrement a aussi écrasé l’autel et le plateau liturgique. L’ensemble de la toiture – ainsi que la charpente en chêne du Moyen-Âge – sont perdus. Privée de son toit, atteinte dans ses voûtes, Notre-Dame baigne dans un jour sépulcral, révélé dans l’amputation brutale subie quelques heures plus tôt : une cathédrale à ciel ouvert, portant la marque d’un traumatisme inexprimable.
Quelques miracles
Malgré des pertes considérables, la cathédrale conserve son intégrité structurelle. Ses tours, intactes après l’assaut des flammes, en témoignent aujourd’hui de la plus belle manière. Outre les statues de la flèche, le feu a aussi épargné le grand orgue, la Croix de gloire et les roses médiévales.
Bien sûr, on s’est fait beaucoup de souci pour l’orgue. Quand on a su qu’il était indemne, ça a été un soulagement indescriptible.
Yves Castagnet, organiste titulaire de Notre-Dame
Par ailleurs, l’une des priorités des équipes fut d’évacuer les œuvres majeures de Notre-Dame, ainsi que sa plus précieuse relique, la Couronne d’épines. En accord avec le plan de sauvegarde des œuvres, le régisseur général de la cathédrale et les conservateurs des Monuments historiques se sont engouffrés à la suite des pompiers pour sauver la Couronne. Le reliquaire qui l’abritait a dû être détruit dans l’opération.
Le soir de l’incendie, dans l’urgence de l’instant, nous nous sommes retrouvés à sauver tout le patrimoine que nous pouvions. Je me suis retrouvé à mettre un Clou de la Passion dans la poche de ma parka, la Couronne d’épines, dans son écrin en cuir, que j’ai prise sous mon bras… Ce jour-là, ces trésors ont été sauvés grâce au courage et au professionnalisme des équipes mobilisées.
Laurent Prades, régisseur général de la cathédrale Notre-Dame
Enfin, le coq reliquaire qui surmontait la flèche a été retrouvé parmi les décombres, cabossé mais restaurable. Une trouvaille inattendue, qui réchauffa les cœurs au lendemain du drame.
Les premières opérations
Une fois l’incendie terminé, ce sont ses conséquences qui inquiètent les experts. Le feu, les effondrements et l’eau des pompiers ont fragilisé la structure délicate. Afin d’éviter un nouvel écroulement, il est impératif de consolider les parties les plus sensibles, notamment le pignon qui couronne le transept nord et menace de chuter à l’intérieur du monument. Les arcs-boutants, ainsi qu’une partie des voûtes, doivent être cintrés pour préserver les appuis nécessaires à l’ensemble. Il faut aussi déposer l’échafaudage, calciné par les flammes, qui obstrue l’édifice d’une forêt de métal. Un plan de sécurisation est rapidement mis en place autour de Philippe Villeneuve, assisté de Rémi Fromont et Pascal Prunet, architectes en chef des monuments historiques, désignés pour le sauvetage de la cathédrale. Pilotées, à partir de décembre 2019, par l’Établissement public en charge de la conservation et de la restauration de Notre-Dame de Paris, les opérations sont également soutenues par la Fondation Notre Dame via la collecte effectuée auprès des donateurs. Grâce à leur action, et à l’ensemble des acteurs du chantier, la cathédrale est désormais sécurisée.
© Photos Marie-Christine Bertin, Trung Hieu Do – Diocèse de Paris